La Galerie du Crous, à Paris, présente la première exposition personnelle de Flora Aussant dont la pratique s’inspire à la fois de la pseudo-science et de l’ethnobiologie. Une conjugaison sensible entre photographie, sculpture, vidéo et installation.
Le titre de l’exposition, “Digging for a home or a grave” (“Creuser pour une maison ou une tombe”) annonce déjà une première idée de ce que sera son dénouement. Mais cela ne fait pas forcément sens pour le visiteur jusqu’à ce qu’il commence à parcourir les différentes salles de la galerie. Au centre de l’une d’entre elles, un monticule de terre est surplombé par une tête de lit, à la manière de l’indice déjà pointé dans le titre : cela annonce la comparaison entre notre société et la toile dans laquelle évoluent les fourmis. Flora Aussant (née en 1993, France) semble vouloir mener une véritable enquête éthologique, en reproduisant l’environnement des fourmis. Sa visée est d’établir une analogie entre le comportement des insectes grégaires et celui des humains, car parfois, ils se laissent tous deux emporter par des raisonnements qu’ils ne maîtrisent pas.
Omniprésents dans l’exposition, sous des formes plus ou moins déguisées, les insectes laissent des traces, des monticules, des sillons de terre ; ils se perchent à divers endroits, comme dans une bouche ; leurs corps sont représentés par des sculptures en bois ou en cire. Parallèlement, ces formes sont accompagnées de photographies. Certaines sont présentées sous la forme d’un diptyque, séparées par une nervure dans laquelle circulent de petites boules de métal. Cependant, les billes ne peuvent pas échapper à cette obstruction et sont coincées entre les photographies. Dans certaines d’entre elles, les membres des personnes sont présentés dans une position étirée, comme si elles essayaient de desserrer leurs articulations. Par la pratique du collage, du transfert d’images sur divers supports sculpturaux, Flora Aussant parvient à donner un même sens à l’ensemble. Le fait qu’elle utilise le diptyque comme support ne semble pas anodin, car ce format est bien connu dans l’histoire pour sa connotation religieuse. En l’utilisant, l’artiste semble non seulement placer les images humaine et animale au même niveau, mais aussi renouveler ces représentations à partir d’une dimension dévotionnelle. En effet, la plasticienne fait une critique du développement personnel, qui offre des espérances irréalisables dans des contextes d’abus et d’excès de pouvoir. Elle met en scène des personnes qui veulent y faire face, en devant lutter contre un sentiment d’absurdité et de vide.
À l’étage, deux vidéos sont diffusées sur écrans et clôturent l’exposition. L’artiste fait une parodie de la culture du bien-être, en énumérant chacune de ses fausses promesses. Flora Aussant remet ainsi en question l’éloge du développement personnel, qui est devenu un slogan dans le monde du travail. Elle souligne le paradoxe lié au fait d’inscrire ce discours dans un contexte éprouvant qui nous accable mentalement et physiquement, et qui cherche par tous les moyens à nous rendre le plus productif possible. Les œuvres présentées dans cette exposition nous amènent, au bout du compte, à réfléchir sur les contradictions de notre société capitaliste, liées à sa vision consumériste des individus et au contrôle exercé sur nous-mêmes. •
Exposition “Digging for a home or a grave” by Flora Aussant
Jusqu’au 4 mars 2023 at Galerie du Crous
11, rue des Beaux-Arts – 75006 Paris
crous-paris.fr
Vue d’exposition, “Digging for a home or a grave”, Flora Aussant, 2023, courtesy of La Galerie du Crous and the artist
Vue d’exposition, “Digging for a home or a grave”, Flora Aussant, 2023, courtesy of La Galerie du Crous and the artist
Vue d’exposition, “Digging for a home or a grave”, Flora Aussant, 2023, courtesy of La Galerie du Crous and the artist
Vue d’exposition, “Digging for a home or a grave”, Flora Aussant, 2023, courtesy of La Galerie du Crous and the artist
Vue d’exposition, “Digging for a home or a grave”, Flora Aussant, 2023, courtesy of La Galerie du Crous and the artist
