Dans sa dernière exposition, la galerie Semiose nous a invité à explorer un labyrinthe rempli d’histoires et de souvenirs intimes. Pour l’occasion, le peintre Anthony Cudahy a rassemblé le travail de dix artistes américains toutes générations confondues.
Les peintures de Lily Wong (née en 1989, États-Unis) nous accompagnent dès le début de l’exposition et tout au long du dédale, évoquant des mondes parallèles et nous plongeant dans des histoires qui auraient pu être tirées d’un récit d’Ursula K. Le Guin. Ses personnages semblent être suspendus entre deux possibilités, sur un seuil entre deux mondes. On retrouve des éléments symboliques récurrents dans l’œuvre de Lily Wong qui relient une image à une autre, tissant un fil narratif entre toutes ses peintures : la lune, le rouge, les arbres, les plantes. Influencée par la médecine orientale, Wong crée une conversation entre le corps et son environnement, à la recherche de connexions ancestrales et spirituelles. Plus loin dans l’exposition, les peintures de Philomena Williamson (née en 1951, États-Unis) nous emmènent directement dans l’intimité de la chambre. Ses tableaux représentent des adolescents et des poupées dans un décor onirique et énigmatique, ancré dans ses souvenirs d’enfance. À bien des égards, les peintures de Williamson peuvent être vues comme une incarnation de l’angoisse et du désespoir liés à l’enfance et l’adolescence. En passant des couleurs vives au noir, l’artiste parvient à capturer la magie de ces périodes, mais aussi l’anxiété qui peut les accompagner.
Devin N. Morris (né en 1986, États-Unis) nous surprend avec ses peintures aux techniques mixtes. L’artiste originaire de Baltimore entreprend une abstraction de la vie américaine et des systèmes de valeurs traditionnels, tout en explorant son identité raciale et sexuelle. La mémoire est présente dans les matériaux et les tissus qu’il utilise, dont beaucoup proviennent d’un environnement domestique et familial. En les disposant de manière symbolique, il cherche à créer des paysages surréalistes qui reflètent une société réimaginée sans frontières et ayant lieu dans un espace réel. En parallèle, les peintures à l’huile d’Andersen Woof (né en 1989, Chine) se concentrent sur l’examen d’émotions contradictoires et stratifiées, explorant des récits ambigus. En tant qu’immigrant asiatique et homosexuel, Andersen cherche à donner une version de son parcours personnel tout en explorant des thèmes comme la solitude, la peur, la violence et le désir. Ce faisant, il raconte l’histoire de personnages qui partagent des expériences émotionnelles similaires aux siennes dans la vie réelle. À travers chacune de ses peintures, Woof explore ce que cela signifie pour les gens de vivre simultanément dans la joie et la douleur. Son œuvre révèle ainsi une certaine mélancolie, reflet de son monde intérieur véritable et conflictuel.
“L’esprit est un labyrinthe rempli de pièces récemment abandonnées qui résistent à la sortie”, déclare l’artiste Anthony Cudahy à propos de l’exposition. “The Minotaur’s Daydream” (“Le rêve éveillé du Minotaure”) se présente ainsi comme une passerelle vers le récit personnel qui habite chacun des artistes : migrations, rencontres, rêveries, souvenirs. Bien que partant de l’intimité, ils nous placent sur un terrain commun, étranger à tout lieu et à toute époque, et dans lequel chacun peut voir son être reflété. •
Exposition collective “The Minotaur’s Daydream”
Du 7 janvier au 4 mars 2023 at Semiose
44, rue Quincampoix – 75004 Paris
semiose.com