5 questions à Koak, artiste romantico-cynique exposée chez Perrotin

Exposée pour la première fois en Europe par Perrotin, Koak (née en 1981, San Francisco) dévoile une nouvelle série de peintures à Paris. Entre portraits féminins et inspiration tirée des comics, l’artiste américaine multiplie les motifs et les lignes dans une veine ondulatoire.

Bande dessinée, manga, lignes douces, figures féminines… Quelles sont les inspirations qui nourrissent votre style artistique ? 

Koak : Pour moi, il y a une distinction entre le développement d’un style artistique et le fait d’être en dialogue avec l’inspiration. J’ai toujours considéré le style comme la voix d’un artiste, un processus de développement intuitif qui est propre à chaque individu, puis l’inspiration comme l’interaction entre le soi et ce que l’on rencontre ou ce qui nous attire à l’extérieur… Une ressource créative qui nous encourage à poser des questions et nous communique des informations sur le monde, sur la manière dont notre travail s’y intègre. Ce qui a façonné ma voix, c’est le désir d’une communication claire et d’une connexion avec un monde dont je me sentais coupée — une volonté d’exprimer ce qui était significatif pour moi dans l’espoir que d’autres s’y connectent et s’y rattachent à leur tour, d’une manière significative pour eux. […]

En explorant des thèmes universels à travers symboles et représentations, comment espérez-vous que le visiteur interprète et s’engage dans votre œuvre ?

Koak : J’espère que mon travail opère comme une sorte de miroir. Il y a des peintures, des installations, de la musique, des livres et des poèmes qui m’ont permis cela — de trouver une partie de moi-même que je n’avais pas encore découverte ou qui était en train de se perdre, et d’acquérir à travers eux une manière plus nuancée de comprendre le monde. Je suis toujours une romantique dans l’âme lorsqu’il s’agit de cet aspect de l’art, bien que je sois terriblement cynique dans d’autres aspects de ma vie. […]

Vous indiquez que vos figures sont rarement basées sur des personnes en particulier, mais qu’elles servent plutôt de passerelle pour relier l’universel à l’individuel. Pourquoi ?

Koak : J’ai commencé à montrer mon travail dans des bars et des cafés dès l’âge de 15 ans. J’étais entourée de punks, de drames et de beaucoup de drogues, et j’étais une enfant terrifiée. Faire des œuvres, qui à l’époque étaient autobiographiques et très crues, était le seul moyen pour moi de m’exprimer. Il y avait un niveau d’intimité qui me semblait nécessaire pour que la communication entre le spectateur et moi soit authentique. En grandissant, mon point de vue a changé… […] Il s’agit donc de créer des œuvres profondément personnelles à travers un prisme universel, en retirant suffisamment de soi-même pour que ce qui y est dépeint devienne presque un archétype ou une mythologie — une expérience de la sorte simplifiée révèle une idée plus vaste, tout cela dans l’intention que le spectateur la rende de nouveau personnelle, en lui donnant de nouvelles couches de profondeur grâce à l’addition de sa propre intimité. […]

Vous parlez aussi de l’importance des lignes, que vous comparez au « langage et à la tonalité » d’une œuvre. Pourriez-vous nous en dire plus ?

Koak : Un changement subtil dans une ligne peut avoir un impact émotionnel fort, tout comme la tonalité de la voix peut changer le sens des mots — ce qui est dit explicitement par rapport au sens implicite, sous-jacent. Si l’image est une phrase, une pensée ou une suite de mots, alors la forme des lignes, leur courbe ou leur effilement, porte le poids de la signification. L’image peut être une femme assise à une fenêtre et porter tout le poids des nuances, des connotations du spectateur quant à ce que cette représentation signifie symboliquement, historiquement dans le canon de l’art, ou encore personnellement car considérant sa propre expérience de vie.

En quoi votre approche de la sculpture diffère-t-elle de votre travail sur toile et quelles sont les considérations esthétiques qui vous guident à travers ce médium ?

Koak : Je ne sais jamais ce qu’une sculpture va devenir avant qu’elle ne soit réalisée — elles ne sont pas esquissées comme mes peintures, donc le processus de déplacement des lignes et de recherche de sens se produit en temps réel. […] Mes sculptures sont toutes issues de ma voix ; elles parlent toutes de la même esthétique ; elles comportent chacune leurs propres défis, mais tous ces défis informent les autres pans de mon travail. C’est une sorte de relation symbiotique que je trouve incroyablement importante pour ma pratique d’atelier. 

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Exposition “Lake Margrethe” by Koak
Jusqu’au 5 octobre 2024 at Perrotin Paris
76, rue de Turenne – 75003 Paris
perrotin.com


Vue de l’exposition de Koak “Lake Margrethe” chez Perrotin, Paris, 2024. Courtesy de l’artiste et de Perrotin. Photo : Claire Dorn.

Koak, The Shell, 2023-2024, peinture flashe, graphite, copeaux de crayon sur lin, 218.4 x 174.6 cm. Courtesy de l’artiste et de Perrotin. Photo : Chris Grunder.

Vue de l’exposition de Koak “Lake Margrethe” chez Perrotin, Paris, 2024. Courtesy de l’artiste et de Perrotin. Photo : Claire Dorn.

Koak, Magritte’s Door, 2024, peinture flashe, acrylique, copeaux de crayon sur lin, charbon de bois liquide aux pépins de raisin sur lin, 188 x 149.9 cm. Courtesy de l’artiste et de Perrotin. Photo : Chris Grunder.

Vue de l’exposition de Koak “Lake Margrethe” chez Perrotin, Paris, 2024. Courtesy de l’artiste et de Perrotin. Photo : Claire Dorn.

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