Exposé à la galerie Jousse Entreprise, Simon Martin présente “Ce qui dort sous les pétales”. Un solo show qui fait fondre ombres végétales et silhouettes humaines dans des lavis colorés, au profit d’une sensibilité marquée par le flou.
Une pensée. Une relation. Un moment. L’éclosion d’une fleur. Les pétales qui s’envolent. Un rêve qu’on oublie au réveil. Le jour qui s’efface au profit de la nuit.
Les peintures de Simon Martin (né en 1992, Vitry-sur-Seine) rendent compte de l’éphémère et des processus relatifs à la mémoire. Encres, pastels, acryliques et huiles rejouent sur la toile ou le papier, les procédés qui permettent d’imprimer des souvenirs, que ce soit une image dans notre rétine ou sur le film photographique. Les formes, souvent floues, les détails, épars, les couleurs troubles renvoient en effet aux images qui apparaissent doucement sur les photographies polaroïd, les monochromes des cyanotypes ou les négatifs des pellicules. Les images se dévoilent dans l’éclat de la lumière, cette lumière même qui leur permet de perdurer, de se maintenir, un tant soit peu.
Simon Martin joue de la prégnance et de la puissance de la matière picturale pour donner forme à ces images qui prennent véritablement corps à travers la peinture. Ce sont des détails qui s’inscrivent ainsi dans l’espace : les souvenirs sont clairsemés, puisque la mémoire est sélective. Pourtant, même dans la lumière, le flou et les omissions, les images naissent de la force des pigments sur leur support, du relief des couches picturales. Les peintures inscrivent des scènes au fil des tableaux, au fil de l’eau. Outre le geste du pinceau qui appose la matière en sillons, il y a en effet une certaine liquéfaction dans les tableaux de Simon Martin. Les images sont vaporeuses ou brumeuses, elles se reflètent les unes avec les autres, se répètent comme dans un cycle. Un éternel recommencement au milieu duquel se figent des impressions, se précisent des nuances.
Prenons un mur : la peinture jaunit puis s’écaille au fur et à mesure du beau temps et des intempéries. La végétation s’en empare. Les ombres font danser leurs formes. Dans un laps de temps, une multitude d’impressions prennent vie. D’autres meurent. Car peindre les souvenirs, c’est aussi figurer l’oubli. Les images disparaissent pendant qu’elles naissent, « ton absence laisse des traces sur les murs », comme en informe le titre éponyme d’une huile sur toile de l’artiste, datant de 2016. Simon Martin peint des fantômes, des visages qui s’effacent et des pétales qui, déjà, tombent tandis que les fleurs fanent. Dans l’intimité des souvenirs évoqués, quelque chose déjà se termine, se meurt : des vacances. Une journée. Un moment. Une pensée. Une relation. Une vie. •
Exposition “Ce qui dort sous les pétales” by Simon Martin
Jusqu’au 13 mai 2023 at galerie Jousse Entreprise
6, rue Saint-Claude – 75003 Paris
jousse-entreprise.com