Temps fort de la Mexico City’s Art Week, la foire d’art contemporain Material souffle sa dixième bougie cette année. Jusqu’au 11 février, elle s’ancre dans le quartier dynamique de Juarez au cœur de la capitale mexicaine et donne à voir un échantillon de la jeune scène artistique internationale.
Nés dans les années 1980 et 1990, les artistes présentés à l’occasion de Material Art Fair donnent le pouls des tendances visuelles qui irriguent la jeune création. Cette énergie est marquée par une représentation du corps qui explore le registre de l’étrange, du drame, à l’image des sculptures murales de Federico Cantini (né en 1991) qui empoignent des armes blanches menaçantes et pourtant inoffensives car immobiles. Également animé par ce vocabulaire sombre, David Weishaar (né en 1987) choisit la peinture figurative pour représenter des êtres imagés au cœur de mondes nocturnes, dont on ne sait s’il s’agit du désir ou de la mort qui rôde au centre de la toile. Corentin Darré (né en 1996), quant à lui, œuvre en faveur de récits portés sur l’altérité et les relations humaines qui s’expriment par la matérialisation plastique d’un imaginaire collectif : il associe les codes iconographiques de l’Ouest américain à travers une photographie et un cadre cartoonesque pour révéler une pièce ambivalente évoquant à la fois le cruising gay et le film western.
Comme l’éclaire son nom, Material Art Fair met en lumière des œuvres dont la matérialité résulte d’expérimentations diverses. C’est ce que Raúl Aguilar Canela (né en 1988) manifeste avec ses textiles imprimés de natures mortes florales, poétiquement floutées, qui sèment les indices de réalités sous-jacentes plus dures, plus sévères, tel qu’un bouquet posé dans une chambre d’hôpital. La vignette narrative prenant appui sur le monde tangible se trouve aussi dans le travail pictural de Sophie Barber (née en 1996) : soulignée par des légendes descriptives directement intégrées à ses images, l’artiste gâche la représentation fidèle de souvenirs — collectifs ou personnels — en peignant grossièrement, en multipliant les empâtements et en cornant les bords de ses toiles, comme pour tirer un trait sur une traduction parfaite de l’histoire passée. La matérialité s’évoque aussi à travers la faune et la flore, réinterprétés par les reliefs de Klara Zetterholm (née en 1991), de Martin Llavaneras (né en 1983) et d’Abigail Lucien (née en 1992) ; cette dernière dissimule, sous un flocage rose bonbon et de prime abord attrayant, la triste capture de papillons au sein d’une toile d’araignée. Autant d’artistes qui bousculent la réalité environnante pour en dresser de nouveaux systèmes visuels. •
Material Art Fair
Jusqu’au 11 février 2024 at Expo Reforma
Morelos 67, Col. Juárez, Del. Cuauhtémoc – 06600 Mexico (Mexique)
material-fair.com