© Erwin Wurm, Untitled (Palmers), 1997
L’artiste autrichien Erwin Wurm est célèbre pour son œuvre conceptuelle mêlant sculpture, performances, vidéo, dessin et photographie, à travers laquelle il associe espièglerie et sens profond de l’absurde. Son travail interroge souvent avec ironie et cynisme notre relation au corps, plaçant fréquemment le spectateur dans une relation paradoxale avec les objets. S’il est essentiellement connu pour ses sculptures, la photographie en tant que médium a toujours joué un rôle primordial dans son travail, à la fois pour illustrer et archiver ses œuvres et performances éphémères, mais également en tant que médium à part entière.
Réunissant quelque 200 tirages réalisés depuis les années 1980 sur les deux principaux étages de la MEP, cette exposition majeure – la première en la matière organisée à Paris depuis près de vingt ans – présentera planches contact originales, tirages et études provenant des archives personnelles de l’artiste, qui n’ont pour la plupart encore jamais été présentées au public. Parmi les œuvres exposées, des travaux inédits réalisés spécialement pour cette exposition dont plusieurs à partir de photos des archives de l’artiste. Cette exposition dévoile le rôle unique joué par le médium photo dans l’œuvre d’Erwin Wurm, explorant son processus de création et sa manière d’envisager la photographie comme une forme d’expression « sculpturale ». L’artiste désigne d’ailleurs ces œuvres sous le nom de « sculptures photographiques ».
Dès ses premiers travaux photographiques, Erwin Wurm a cherché à réinterpréter la définition traditionnelle de la sculpture en tant qu’objet tridimensionnel placé souvent sur un piédestal. Il s’intéresse aux idées de volume, de poids, de structure, de gravité, de forme et de masse, et ce dès The Arrival of the Portuguese in South America, série expérimentale datant du milieu des années 1980, à voir au début de l’exposition. Cette réflexion se poursuit avec ses sculptures de poussière éphémères des années 1990, consistant à placer un objet sur une surface, à le saupoudrer de poussière puis à le soustraire aux regards, n’en laissant qu’une empreinte résiduelle amenée à disparaître.
Pour Erwin Wurm, le corps humain, avec sa capacité à remplir un pull, à occuper l’espace, à prendre ou perdre du poids, est une sculpture à part entière. La première partie de l’exposition présente également la vidéo et les photographies du projet Fabio Gets Dressed (1992), pour lequel l’artiste a demandé à un ami d’enfiler tous ses vêtements les sur les autres, le transformant ainsi en une sculpture humaine boursouflée. Dans 59 Positions, la même année, l’artiste et quelques uns de ses amis, prennent 59 poses incongrues où le vêtement distendu et l’homme se confondent. On retrouve aussi cette idée de sculpture humaine dans Palmers (1997), série photo conçue comme une campagne de pub pour une marque de lingerie autrichienne, ainsi que dans la série encore inédite Gestures.
Au cœur de l’exposition, présentées au 3e étage de la MEP, les mythiques One Minute Sculptures, qu’Erwin Wurm a initiées dans les années 1990. Pour ces œuvres, qui allient sculpture éphémère, performance et esthétique relationnelle, l’artiste donne des consignes écrites ou dessinées à des participants (ou à lui-même) afin qu’ils prennent des poses absurdes accompagnés d’objets du quotidien tels que des seaux, des balles de tennis, des fruits ou des vêtements. L’espace de soixante secondes – le temps de la pose – l’absurdité de la situation laisse place à des préoccupations existentielles plus vastes. //
Exposition Photographs by Erwin Wurm
Jusqu’au 7 juin 2020 at Maison Européenne de la Photographie
5-7 rue de Fourcy 75004 Paris
www.mep-fr.org