Toby Zeng, mise en observation

Par Laëtitia Toulout

PHOTO // Le photographe chinois Toby Zeng puise dans le monde réel des images qu’il fragmente par points de vue. Entre zoom et hyperflash, ses photographies réécrivent les détails du quotidien par le biais d’aperçus qui se jouent des plans et des perspectives.

Dans son célèbre ouvrage La Mise en scène de la vie quotidienne (1956), Erving Goffman décortique les comportements et représentations des individus, acteurs sans le savoir d’une certaine stabilité la vie sociale. Ce bon déroulé du quotidien passe par le déploiement infini d’un éventail de règles et de normes implicites. C’est pour ce maintien qui nous permet de vivre ensemble, que la mise en scène, au sens théâtral du terme, a lieu partout, tout le temps et dans les actes les plus insignifiants : chacun joue ses jeux.

Un grand sens de l’observation et le plaisir du décorticage apparaissent chez Toby Zeng, qui use de son appareil photographique comme un sculpteur de ses mains ou un scientifique de son microscope. Les images s’attachent à des détails, voire des absurdités, composent des courbes et des lignes, mettent en valeur des couleurs.

Tout semble s’être agencé naturellement, comme si le photographe n’avait plus qu’à poser son cadre, dessiner les contours. İl aura bien fallu en amont un œil averti, et c’est là toute la particularité de Toby Zeng, qui voit déjà l’œuvre d’art dans des amoncellements de poubelles, des morceaux de corps ou encore des troncs d’arbres dans l’obscurité. Les formes qui se dessinent sont captées de manière à être mises en avant, au centre de l’attention, personnifiées au cœur des compositions. Toby Zeng indique lui même qu’il traite par exemple les arbres comme s’il s’agissait de célébrités : il se fait le paparazzi des petites choses de la vie, donne à observer ce que personne ne voit plus. Tout peut être sujet. Le beau n’est pas ce qui fait l’unanimité, bien au contraire ; c’est une notion toute subjective qui peut se réécrire à l’infini : dans un détail un peu de travers, dans un trait insolite.

Né en 1998 à Beijing, en Chine, Toby Zeng a très certainement évolué depuis toujours dans un monde d’images : on sent chez lui de vastes inspirations qui piochent tout autant dans la mode, la publicité que le graphisme. Tout est mixé et recraché lors de balades dans la rue ou au bord de la piscine, où le photographe fige la vie quotidienne, agence les représentations et nous invite finalement à s’amuser du monde avec lui. //


Toby Zeng
www.tobyzeng.com


 

Toby Zeng, mise en observation