Hoda Kashiha : du cartoon au cubisme

L’artiste iranienne Hoda Kashiha est exposée pour la première fois à Paris, au sein de la galerie Nathalie Obadia. À première vue légère, son œuvre est saturée d’humour et de second degré, évoquant le contexte social et le climat politique du pays où elle a grandi.

Une fille marche joyeusement dans un parc en tenant une fleur à la main. Soudain, une tache noire vient brouiller la scène, lui attribuant un aspect plus triste, plus sombre. La protagoniste apparaît ainsi coupée en deux, comme floue. Parfois par la représentation de croix, d’autres fois par l’utilisation de souillures irrégulières, Hoda Kashiha (née en 1986, Iran) donne une fonction centrale aux marques de peinture dans les tableaux de sa série I am Here, I am not Here (Je suis là, je ne suis pas là), qui occupe la première partie de l’exposition. En effet, l’artiste iranienne utilise ces taches opaques de couleur en tant que métaphore du pouvoir politique et technologique qui, encore aujourd’hui, piège les individus, ainsi que ses représentations. Kashiha semble ici ne pas parler d’autre chose que de la manière dont nous pouvons être effacés, exécutés ou censurés par un pouvoir ou la mort.

Dans la deuxième partie de l’exposition, intitulée In Appreciation of Blinking (En reconnaissance de cligner des yeux), la couleur noire profonde étend progressivement son voile sur une série de huit toiles placées les unes après les autres, sur des portiques roulants. Sur la première, il fait encore jour ; une figure caricaturale semble plonger dans l’eau, fuyant la bande noire qui mord le bord supérieur du cadre et qui, dans le dernier tableau, a pris le dessus, couvrant toute la surface. Selon Hoda Kashiha, cette série décroissante vise à reproduire le scintillement d’une paupière lorsqu’elle se ferme, en interrogeant notre capacité à croire en l’existence de quelque chose quand nous ne sommes pas capables de la voir. 

Puisant une grande partie de son inspiration dans le monde numérique et les réseaux, Hoda Kashiha présente des représentations si abondantes en couleurs et en formes qu’elles paraissent pixellisées. À travers des compositions réalisées dans une palette de couleurs vives, du jaune au vert fluorescent, l’artiste parvient à apporter une évidente vitalité à ses scènes. Par le biais du dessin manuel et informatique, l’artiste superpose des formes découpées, menant à une sorte de collage picassien, avec des différentes couches riches participant au dynamisme de ses scènes. Développant une peinture pop, qui oscille entre des références au cubisme et des influences cartoon issues du manga, du dessin animé et du jeu vidéo, Hoda Kashiha soulève des sujets contemporains universels tels que les questions de genre et la place de la femme dans la société actuelle.


Exposition “I am Here, I am not Here” by Hoda Kashiha
Jusqu’au 9 novembre 2022 at galerie Nathalie Obadia
3, cloître Saint-Merri – 75004 Paris
nathalieobadia.com


Hoda Kashiha, I am Here, I am not Here (diptyque), 2020, courtesy de l’artiste et de la Galerie Nathalie Obadia Paris/Bruxelles © Aurélien Mole

Hoda Kashiha, The Eye, The Eyehole, The Hole, 2021, courtesy de l’artiste et de la Galerie Nathalie Obadia Paris/Bruxelles

Hoda Kashiha, The Time He Left His Shadow, 2021, courtesy de l’artiste et de la Galerie Nathalie Obadia Paris/Bruxelles

Hoda Kashiha, I am Here, I am not Here, 2021, courtesy de l’artiste et de la Galerie Nathalie Obadia Paris/Bruxelles

Hoda Kashiha, I am Here, I am not Here, 2020, courtesy de l’artiste et de la Galerie Nathalie Obadia Paris/Bruxelles © We Document Art

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