Lauréat du Prix Maison Ruinart 2022, Matthieu Gafsou présente à l’occasion de Paris Photo une série d’images inédites, à la fois contrastées et mystérieuses. Une production artistique où réside une atmosphère brûlante, laissant place au questionnement de l’impact humain sur la nature.
Exposé parmi les dix-sept talents émergents internationaux du secteur Curiosa, Matthieu Gafsou (né en 1981, Suisse) a été récompensé cette année du Prix Maison Ruinart qui distingue depuis 2018 de jeunes photographes. Présentée pour la première fois à Paris Photo, sa série Cette constante brûlure de l’air met en lumière une pratique hybride qui associe réalité documentaire et démarche plasticienne. Les images créées par l’artiste, fruits d’une résidence en Champagne l’été dernier à l’invitation de Ruinart, rendent compte de paysages pluriels — à la fois ruraux et agricoles, urbains et industriels —, où flotte une lumière douce et jaunâtre, perturbant subtilement la lecture des clichés. Dans son procédé créatif, Matthieu Gafsou a teinté ses photographies au moyen de pétrole brut, dès lors envisagé comme un pigment. Il explique : « Ce que j’aime beaucoup avec cette technique du pétrole c’est que par certains égards elle se rapproche des procédés anciens de la photographie, ce que l’on appelle un virage : quand un élément chimique vient teinter le tirage (historiquement l’or, le cuivre, le sélénium, etc.). Or l’effet visuel produit par cet improbable virage traduit, me semble-t-il, assez bien les conséquences du pétrole sur notre milieu : à savoir une contamination non pas localisée mais globale. Visuellement, on voit bien qu’il y a quelque chose de “sale” et, en même temps, cette saleté produit un effet qui peut aussi se rapprocher du sublime : l’inquiétude ou l’effroi qui peuvent émerger de scènes a priori triviales que j’ai photographiées renvoient au sublime, font ressurgir cette puissance destructrice que l’on allait chercher au 19e siècle dans les montagnes ou les océans. » Ainsi formule-t-il ici tout le paradoxe qui irrigue volontairement son travail : la notion de « beau » rencontre celle de la destruction. •
Matthieu Gafsou at Paris Photo (secteur Curiosa)
Du 10 au 13 novembre 2022
Grand Palais Éphémère – 2, place Joffre 75007 Paris
parisphoto.com