Vidya Gastaldon, un cosmos palpable au Mrac Occitanie

Au Mrac Occitanie, à Sérignan, Vidya Gastaldon nous convie dans sa “Demeure sans murs”, exposition de moult œuvres, peintures, sculptures, vidéos, géométriques et colorées, figuratives et abstraites, chacune se liant aux autres afin de nous faire prendre conscience de la structuration de l’univers, un tout où chaque chose est liée.

Sous la charpente du musée, Vidya Gastaldon (née en 1974, Besançon) aménage l’intérieur, en disposant notamment deux pendules comtoises en face à face et des chaises en cercle. Les meubles, peints par l’artiste « parlent entre eux » et nous pouvons rejoindre leurs conversations, tandis que les murs de l’hypothétique demeure éclatent, se morcellent, redeviennent briques et s’envolent, disparaissent. 

Il s’agit effectivement de faire tomber les murs, non pas seulement ceux de sa demeure ou de son enveloppe corporelle, mais aussi des manières de voir et de penser qui nous sont propres : Vidya Gastaldon nous convie à aller au-delà. Les pièces, qu’il s’agisse de meubles, de tableaux, de cubes colorés ou d’un ensemble d’assiettes sur lesquelles sont peintes des yeux, sont vivantes : elles nous observent autant que nous les regardons. Nous pouvons les appréhender avec une approche sensuelle, capter les formes, couleurs, sonorités, comme pourront le faire les enfants, mais aussi les considérer comme les parties d’un « nous », avec lesquelles nous pouvons réagir réciproquement. La vie est partout, comme le symbolise l’œil démultiplié et omniprésent. « Les œuvres sortent de leurs matières », comme la peinture qui glisse de la toile sur le cadre, s’ouvrant vers l’extérieur. Au-delà de leurs matériaux palpables et physiques — toiles vierges ou objets trouvés et réinterprétés — les œuvres sont créées à partir du psychisme et mêlent des référentiels extrêmement variés, allant de l’histoire de l’art à la philosophie indienne, de la bande dessinée au jeu vidéo en passant par le yoga ou l’architecture paysagère, etc. À travers un panel protéiforme, Vidya Gastaldon aspire et expire les références, les inspirations.

L’exposition s’organise en quatre chapitres, qui fonctionnent comme si nous franchissions différents paliers d’états de conscience. Ces derniers sont symbolisés successivement par l’intérieur de la demeure, la spiritualité, la vision et enfin le jardin. Une fois que les murs de la maison tombent — ou s’envolent — nous entrons dans le deuxième espace, considéré par l’artiste comme un « ashram, mosquée, église ». Elle y déploie un alphabet, une lettre par tableau, chaque caractère étant relié à une sonorité, une couleur, une forme, un ton, une respiration. Au centre, un instrument de musique inventé — en collaboration avec l’artiste Alexandre Joly — permet à qui le veut de faire vibrer l’espace. Les œuvres appellent à la méditation. La troisième salle accueille une seule pièce, une boucle vidéo, kaléidoscopique et hypnotique, intitulée Visionium. Mouvement perpétuel de couleurs et de formes, l’œuvre crée un trouble dans notre vision, un effet d’optique qui tend à faire converger notre regard vers le centre — un œil ? —. Cette hypnose visuelle est une étape intermédiaire, faisant suite au décloisonnement puis à la méditation, avant la quatrième et dernière salle : le jardin. En l’occurrence, c’est à un jardin à la française qu’une installation, composée de formes géométriques en volume, renvoie. Dans l’histoire de l’humanité, la géométrie a été utilisée pour tenter de comprendre le cosmos, la structure du monde. Mais le jardin est avant tout le lieu de rencontre, d’association des plantes. Celles-ci se mêlent, ici, dans une galerie de portraits : des créatures mi-humaines, mi-végétales, dont la figure apparaît à travers un enchevêtrement de branches, de feuilles et de fleurs. Nées de l’hybridation et nous observant de manière frontale, elles paraissent nous dire l’interdépendance des éléments, dont la connexion crée le monde. 

C’est justement le point clé de l’exposition : comprendre que tout se lie. Les objets paraissent à première vue différents, mais ils font sens ensemble ; les yeux et formes géométriques glissent d’une pièce à une autre ; les références les sensations se mêlent. En prenant conscience que les choses appartiennent à un « tout », nous touchons du doigt la sensation de l’intrinsèque unicité ; l’harmonie du cosmos.


Exposition “Demeure sans murs” by Vidya Gastaldon
Jusqu’au 9 mars 2025 at Mrac Occitanie
146, avenue de la plage – 34410 Sérignan
mrac.laregion.fr


Vue de l’exposition « Demeure sans murs » de Vidya Gastaldon, Mrac Occitanie, Sérignan, 2024. Photo : Jean-Christophe Lett.

Vue de l’exposition « Demeure sans murs » de Vidya Gastaldon, Mrac Occitanie, Sérignan, 2024. Photo : Jean-Christophe Lett.

Vidya Gastaldon. Déméter, 2017, acrylique sur toile, 40 x 50 cm, courtesy de l’artiste.

Vue de l’exposition « Demeure sans murs » de Vidya Gastaldon, Mrac Occitanie, Sérignan, 2024. Photo : Jean-Christophe Lett.

Vidya Gastaldon, Les yeux libres (Limule), 2022, assiettes peintes et vernies, dimensions variables, 200 x 170 cm environ, courtesy de l’artiste.

Vue de l’exposition « Demeure sans murs » de Vidya Gastaldon, Mrac Occitanie, Sérignan, 2024. Photo : Jean-Christophe Lett.

Vidya Gastaldon, un cosmos palpable au Mrac Occitanie