Programme d’accompagnement et de professionnalisation des jeunes artistes en début de carrière, « Les Sillons » présentent une première exposition qui réunit le travail de treize artistes internationaux. Tant du point de vue des supports artistiques que des thèmes abordés, ce group show véhicule des messages personnels et universels.
Ponctuant l’exposition “Les Sillons”, les références à Internet et à la culture vidéo sont nombreuses. Charles-Arthur Feuvrier (né en 1997, Île Maurice), par exemple, propose une installation inspirée de deux piliers de la culture populaire, à savoir la télé-réalité et les trick shots de TikTok. Dans son œuvre, l’artiste questionne l’idéologie de la réussite exaltée par ces outils, ainsi que notre quête de validation par autrui, mettant de côté la créativité au profit d’un intérêt purement économique. D’autre part, HaYoung (né.e en 1993, Corée) présente une intelligence artificielle qui analyse les données de plusieurs personnalités choisies par l’artiste et produit différents parfums qui incarnent chacune d’elles. Vincent Caroff et Juliette Jaffeux (nés en 1997 et 1995, France), quant à eux, travaillent sur des formes de culture populaire, notamment le live gaming. Leur nouvelle création vidéo en 3D présentée ici est basée sur la technique du foundfootage, c’est-à-dire la création d’une vidéo à partir d’images trouvées sur Internet.
En parallèle, certains artistes recourent à l’autobiographie, en se montrant eux-mêmes dans leurs productions et en parlant des discriminations auxquelles ils ont été confrontés en raison de leur identité de genre, de leur orientation sexuelle, de leur situation médicale ou tout simplement de leur apparence. C’est le cas de Théophylle Dcx (né en 1996, France) qui, par le biais du format vidéo, nous montre les boîtes de médicaments qui ont accompagné ses six dernières années de séropositivité. Il nous raconte l’évolution de sa maladie, ainsi que la sérophobie dont il a été victime. De même, Nesrine Salem (née en 1995, France) aborde par la vidéo sa condition de femme racisée, queer, avec un handicap invisible : la bégaiement.
Plusieurs artistes nous montrent que la création peut avoir un certain pouvoir de guérison, tant pour l’artiste que pour le spectateur. Ainsi, Jacopo Belloni (né en 1992, Italie) s’inspire de la récente crise de la Covid pour créer des objets dans lesquels il explore notre besoin de rituels et de soulagement face à un quotidien de plus en plus consumériste et éloigné d’un regard spirituel. De son côté, Omar Castillo Alfaro (né en 1991, Mexique), inspiré par la colonisation et l’effacement des traditions et des richesses culturelles induit par l’occidentalisation, cherche à retrouver un lien avec son pays d’origine à travers le travail de la terre. Les fleurs, motif récurrent de la peinture américaine précoloniale, apparaissent dans son œuvre tel un hommage à la mémoire mexicaine.
En utilisant une variété de médiums et de thèmes, les artistes de ce premier chapitre des “Sillons”, curaté par Thomas Conchou, partagent une réflexion sur les liens entre les personnes et l’image qu’elles créent sur Internet, ainsi qu’entre l’art et les traumatismes individuels et collectifs, qu’ils soient historiques ou actuels. À partir de cette position, les artistes parviennent, en fin de compte, à réfléchir à ce que signifie de faire communauté. •
Exposition collective “Les Sillons”
Jusqu’au 16 juillet 2023 at La Ferme du Buisson
Allée de la Ferme – 77186 Noisiel
lafermedubuisson.com